Vous êtes-vous déjà trouvé face à une personne qui ne comprenait pas ce que vous aviez ? Que ce soit votre entourage proche ou le corps médical ?

Beaucoup d’entre nous ont reçu comme recommandation de faire plus de sport, de manger mieux pour retrouver des jambes « normales ». Et même si ces conseils semblent être judicieux, dans la maladie du lipœdème, ils sont loin de pouvoir régler le problème à eux seuls.

Nous rêvons toutes d’être diagnostiquées plus tôt, plus facilement, de ne pas avoir à consulter plusieurs médecins, de ne pas avoir de doute, de pouvoir dire oui il y a bien quelque chose qui ne fonctionne pas bien dans notre corps, d’avoir une preuve.

Mais aujourd’hui, le diagnostic est essentiellement clinique par un examen physique du corps de la personne et un entretien. Et parfois, il est difficile. Le lipoedème n’est pas diagnostiqué ou il peut être caché derrière un lymphœdème ou une obésité.


Un marqueur biologique, le PF4, vient d’être identifié et pourrait être utile dans le diagnostic du lipoedème.

Platelet factor 4 is a biomarker for lymphatic-promoted disorders
Wanshu Ma, Hyea Jin Gil, Noelia Escobedo, Alberto Benito-Martín, Pilar Ximénez-Embún, Javier Muñoz, Héctor Peinado, Stanley G. Rockson, and Guillermo Oliver published June 11, 2020
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Les patients étudiés dans cette étude étaient atteints de lymphœdème, de lipœdème ou de malformations lymphatiques.

A partir d’une prise de sang, le plasma a été analysé. Une protéine, le PF4 (facteur plaquettaire 4), a été isolé de petites vésicules (exosomes) sécrétées par les cellules.

Résultats de l'étude

Toutes les personnes atteintes de lymphœdème, de lipœdème ou de malformations lymphatiques, avaient un taux de PF4 augmenté de manière significative.

Figure 1 taux de PF4 par individus


Ce résultat soutient l'hypothèse selon laquelle l’origine du lipœdème est, au moins en partie, lymphatique !

En pratique, doser le PF4 dans une prise de sang en laboratoire d’analyse médical, permettrait donc d’affirmer qu’il existe une anomalie lymphatique et que cela pourrait être un lipœdème.

L’étude s’est ensuite intéressée au poids des patients


Figure 2 Taux de PF4 en fonction du poids

Les résultats suggèrent que le poids n’a pas d’influence sur les niveaux de PF4.


Lien entre excès de lymphe et masse grasse


Le lymphœdème est une maladie très invalidante qui touche des millions de personnes dans le monde. Il entraîne un gonflement des tissus touchés, par engorgement de liquide. Ce phénomène est lié au dysfonctionnement du système lymphatique. Et cet excès de liquide riche en protéines provoque dans un deuxième temps une modification et une augmentation du tissu adipeux sous cutané, une fibrose et des infections.

Contrairement au lymphœdème, le lipœdème est une maladie dans laquelle aucun œdème n'est observé au début de la maladie.
Cette étude nous apprend donc que le lipœdème est un trouble adipeux avec une contribution probable de dysfonctionnement lymphatique, même s’il n’y a pas d’œdème visible.
On ne sait pas encore si ces anomalies lymphatiques sont partiellement à l’origine de la maladie ou elles sont secondaires, provoquées par l’accumulation de masse grasse sous cutanée.

Un excès de lymphe riche en protéines dans les tissus provoque une synthèse accrue de graisses.

Récemment, de nouveaux rôles pour la circulation lymphatique ont été découvert. Des preuves suggèrent que des vaisseaux lymphatiques asymptomatiques défectueux ou qui fuient pourraient aussi être responsables de certaines formes d'obésité, de maladies inflammatoires de l'intestin et certaines formes de pathologies neurologiques, de glaucome. Le système lymphatique aurait une place bien plus importante que prévue dans le fonctionnement de notre corps et le maintien d’une bonne santé.

Et l'avenir ?

Le PF4 est le premier marqueur biologique trouvé à ce jour pour le lipœdème. C’est une excellente nouvelle et une voie prometteuse.

Le PF4 est capable de distinguer les sujets sains de ceux présentant des anomalies lymphatiques indépendamment de la présence ou de l'absence d'obésité. Il permettrait de dépister des formes débutantes, sans symptômes de lymphœdème, de lipœdème ou d’anomalies lymphatiques et d’aider au diagnostic.

Mais la problématique est aussi de dépister le lipœdème sous un lymphœdème ou une obésité. Ainsi, l'identification de marqueurs fiables et facilement accessibles de dysfonctionnement lymphatique serait une ressource précieuse non seulement pour aider au diagnostic concluant du lymphœdème, mais aussi pour faciliter le diagnostic différentiel chez les personnes atteintes de lymphœdème, de lipœdème et d'obésité.

Après ces étapes de recherche, reste à espérer que les laboratoires verront l’utilité de tels tests et qu’ils mettront en place les protocoles de dépistage.